Sont loyalistes, ceux qui témoignent de la loyauté à leurs souverains ou aux régimes et aux institutions établis en leur restant fidèles face à la rébellion.

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jeudi 28 juillet 2011

Aux racines de l’antagonisme entre Alger et Rabat: la Guerre des Sables

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Les relations entre l’Algérie et le Maroc n’ont jamais été au beau fixe, loin de là. La
rivalité entre les deux pays est à la fois territoriale et idéologique. Dans les années qui
ont suivi l’indépendance de l’Algérie, le régime «progressiste » du FLN incarnait,
tout particulièrement après la prise de pouvoir par Houari Boumediène, le modèle
d’une décolonisation « de gauche » qui voyait la revendication nationale se doubler
d’une guerre révolutionnaire.
Pour l’Algérie socialisante, proche de l’URSS mais aussi en pointe dans le mouvement
des Etats dits « non alignés », le Maroc était un modèle à combattre : celui d’un pays
allié à l’Occident et représentant une tête de pont du monde libre au nord du
continent africain. A Alger, on entendait souvent dire, jusqu’en 1978, que la
« Révolution » échouerait si elle s’arrêtait à la frontière occidentale. Ce n’était
d’ailleurs pas nouveau, l’élite révolutionnaire algérienne avait toujours estimé qu’elle
était dépositaire d’un projet d’indépendance et de développement pour l’ensemble du
Maghreb et l’ancêtre du FLN, l’Etoile nord-africaine de Messali Hadj,
souhaitait la création d’un grand Etat maghrébin incluant la Tunisie et le Maroc.
Du reste, lorsque les protectorats avaient été balayés, en Tunisie et au Maroc, ces
deux pays avaient servi de base arrière aux combattants de l’ALN.
En conséquence de quoi, Alger soutenait avec constance la gauche marocaine qui
cherchait, dans les années soixante, à renverser la monarchie. Ainsi, le dirigeant de
l’Union nationale des Forces populaires (UNFP) Mehdi Ben Barka s’installa-t-il à
Alger. De son côté, le Maroc allait plus tard accueillir des opposants au colonel
Boumediène et, au premier chef,Mohammed Boudiaf.
A deux reprises, cette véritable guerre froide du Maghreb s’est transformée en guerre
ouverte. La deuxième fois qu’Algériens et Marocains s’affronteront directement sera
la bataille d’Amgala en 1976, en pleine « Guerre du Sahara ». Le premier
affrontement ouvert remontait à 1963.
En octobre 1963, un bref conflit armé oppose les armées marocaine et algérienne,
c’est la Guerre des Sables. En cause, les territoires du Sahara, autour de Tindouf,
que la France avait annexés à sa colonie algérienne. Après la bataille d’Isly en maiaoût
1844, la révision des frontières qui avait suivi la défaite marocaine, avec le traité
de Lalla Maghnia, le 18 mars 1845, donnait à l’Algérie Tindouf, le Touat, la Saoura et
Tidikelt. L’Algérie, dans les années soixante, défendait âprement le principe de
« l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation». Mais il n’en avait pas
toujours été de même.
Le Maroc et la Tunisie avaient promis, face au GPRA (Gouvernement provisoire de la
République algérienne), le 6 juillet 1961, qu’ils ne soulèveraient aucune question territoriale avant l’indépendance et le GPRA avait admis, de son côté, que les
frontières coloniales n’étaient pas opposables à ses voisins. Une convention bilatérale
entre le Maroc et le GPRA affirmait d’ailleurs que «les accords qui pouvaient
intervenir à la suite de négociations franco-algériennes ne sauraient être
opposables au Maroc quant aux délimitations territoriales algéro-marocaines…»
En mars 1963, Ahmed Ben Bella confirmait cette convention à l’occasion d’une
visite de Hassan II à Alger. Dans ses mémoires, Hassan II écrit que Ben Bella lui a
déclaré : « Je demande à votre majesté de me laisser le temps de mettre en place en
Algérie les nouvelles institutions. Lorsque, en septembre ou octobre, cela sera fait,
alors nous ouvrirons ensemble le dossier des frontières. Il va sans dire que l’Algérie
indépendante ne saurait être l’héritière de la France en ce qui concerne les frontières
algériennes 147 ».
Une fois au pouvoir, Ben Bella reviendra sur cet engagement et de nombreux
Marocains seront expulsés d’Algérie. Pourtant, le coeur des populations penchait
bien, semble-t-il, vers le Maroc. Dans une note de juin 1962, « le Colonel Chevalier
Chantepie, chef du centre d’exploitation des renseignements, écrit à propos de
Tindouf que les populations Reguibat et Tadjakant de ce centre ont déjà fait leur
choix qui est « incontestablement marocain 148 ». Au début du mois de septembre, la
presse algérienne s’en prend violement à Hassan II qualifié de «pantin ». Le 8
octobre, c’est Alger qui déclenche les hostilités : l’Armée nationale populaire attaque
les Forces armées royales à Hassi Beida. Les combats cesseront le 4 novembre.
Ignace Dalle, qui a longtemps travaillé au Maghreb comme journaliste, estime : « Ce
qui est certain, c’est que, dans ce dossier complexe, la qualité des arguments
marocains et le comportement « fraternel » de Mohammed V pendant la guerre
d’Algérie - même s’il était peu concevable qu’il en fut autrement –méritaient un
traitement plus convenable, moins cavalier et provocateur de la part de
l’Algérie 149 ».
La Guerre des Sables, quoiqu’il en soit, est gagnée par Rabat, même si le Maroc ne
récupérera jamais les territoires perdus, et le traité d’Ifrane de «Fraternité, bon
voisinage et coopération » signé le 15 janvier 1969, est sensé clore définitivement le
chapitre.
147 Hassan II, Le défi, AlbinMichel, Paris, 1976, page 91.
148 Ignace Dalle, Les trois Rois, la monarchie marocaine de l’indépendance à nos jours, Paris,
Fayard, 2004, page 297.
149 Ignace Dalle, page 303.

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